- Allô, Monsieur Gerfaut ? ... Harry, à l'appareil... M. Gerfaut, je voudrais comprendre ce que je fais dans ce récit. Et qu'est-ce que c'est que cette histoire de Caïn et d'œil, qu'est-ce que j'ai à voir avec une allégorie biblique, moi qui ne suis même pas croyant ?
- Eh bien, d'abord, Harry, je te fais remarquer qu'il est moins question de la Bible que de Victor Hugo. J'ai même mis un lien, ce n'est pas bien compliqué à comprendre.
- Mais pourquoi moi ?
- Parce que tu es un personnage de fiction, Harry. Un personnage que j'ai inventé, pour me permettre d'exprimer des parts de moi même, réelles et fantasmées. Mais je paye quelqu'un 70 € toutes les deux semaines pour creuser ce sujet précis, alors ne le prends pas mal, mais je ne vois nul intérêt à discuter de tout ça avec toi. En ce qui te concerne, tu as juste besoin de savoir que tu es un prétexte, le fil rouge d'une histoire que j'ai envie de raconter. Une histoire que j'ai en moi depuis pas mal de temps et que j'aspire à me sortir de la tête. Alors je l'écris, tout bêtement. Et du coup, te voilà, Harry.
- Une histoire ? quel genre d'histoire ?
- Un histoire de l'air du temps, tout banalement. L'histoire d'un monde qui se meurt, de cette classe ouvrière qu'on a voulu humilier, en plus de la rayer d'un simple trait dans un bilan comptable. Et puis une histoire de destins contrariés. Une histoire d'amitié aussi, trahie forcément. Et d'amours, déçus évidemment. Une histoire peuplée de salopards, où tout est gris couleur bitume, gris comme un trottoir sur lequel un ivrogne dégueule. Une histoire pleine de violence, morale, physique, humaine. Bref, une histoire de l'air du temps, je ne peux pas mieux la définir.
- Ca fait surtout beaucoup d'histoires en une seule.
- Tu n'as pas tort. Et c'est sûrement ça qui m'empêchera de la mener à son terme. Ca et le fait que, de toute façon, j'ai une certaine propension à ne pas terminer ce que j'entreprends.
- Mais je me demande, M. Gerfaut : pourquoi faut-il que toujours je trouve la violence sur mon chemin ?
- Cette question est un gag, Harry. Un double gag, même ! Déjà parce qu'elle vient directement de la bande dessinée américaine, elle vient du Surfer d'argent et des 4 Fantastiques. Et en plus, parce que cette phrase est exactement reprise dans le dialogue entre Jean-Patrick Manchette et Griffu, en préambule de l'album éponyme (dessiné par Jacques Tardi, oui là on est maintenant dans la bande dessinée franco-belge).
- Un dialogue comme celui que nous avons en ce moment, en fait. Manière de faire référence à Manchette, qui lui même faisait référence à Stan Lee... comme une filiation en quelque sorte.
- Non, ça n'a rien à voir avec une filiation. De toute façon, je n'aurais pas cette prétention, je ne boxe pas exactement dans cette catégorie là, vois-tu. Mais je pense qu'il est juste normal d'indiquer clairement les sources où on puise son inspiration. Je tenterai même d'en ferai une ligne de conduite, tout au long du récit....
- Et jusqu'où se prolonge cette inspiration, M. Gerfaut ? Je veux dire, rapport à Griffu...
- Mais jusqu'au bout, Harry.
- Alors, ça veut dire que...
- Oui Harry, toi aussi tu finiras dans les ordures comme Orson Welles, dans la Soif du mal.
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